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RAPO : le seul dépôt prématuré du recours contentieux n’entraîne pas son irrecevabilité

Public - Droit public général
18/06/2021
Dans un arrêt rendu le 16 juin 2021, le Conseil d’État déclare qu’un recours contentieux formé prématurément ne peut être rejeté pour irrecevabilité lorsque le RAPO a été déposé et que l’administration s’est prononcée à la date à laquelle le juge statue.
La requérante réclamait l’annulation d’une décision de la caisse d’allocation familiales demandant le reversement d’un indu de revenu de solidarité active (RSA). Elle avait saisi le tribunal administratif et s’était vu opposer un rejet pour irrecevabilité au motif qu’elle n’avait pas exercé un de recours administratif préalable.  
 
En effet, l’article L. 262-47 du code de l’action sociale et des familles prévoit que toute réclamation à l’encontre d’une décision relative au RSA doit faire l’objet d’un recours administratif auprès du président du conseil du département, avant tout recours contentieux.
 
Face au rejet de la demande par le tribunal administratif, le Conseil d’État rappelle dans son arrêt du 16 juin 2016 (CE, 16 juin 2021, n° 440064) que l’objectif du recours administratif préalable obligatoire (RAPO) est de laisser à l’autorité compétente le soin d’arrêter définitivement la position de l’administration.
 
Il déclare que « Pour autant, dès lors que le recours administratif obligatoire a été adressé à l'administration préalablement au dépôt de la demande contentieuse, la circonstance que cette dernière demande ait été présentée de façon prématurée, avant que l'autorité administrative ait statué sur le recours administratif, ne permet pas au juge administratif de la rejeter comme irrecevable si, à la date à laquelle il statue, est intervenue une décision, expresse ou implicite, se prononçant sur le recours administratif ».
 
Ainsi, le seul fait de déposer un recours en justice avant la réponse de l’administration sur le recours administratif préalable ne doit pas conduire au rejet du recours pour irrecevabilité. Il conviendra de vérifier si, à la date à laquelle le juge statue, l’administration s’est prononcée. Si tel est le cas, la demande est recevable.
 
Le Conseil précise donc comment le juge doit traiter le recours, dirigé contre la décision initiale et non contre la décision issue du recours administratif préalable, puisque cette dernière n’était pas intervenue à la date du recours contentieux. En pareil cas, « Il appartient alors au juge administratif, statuant après que l'autorité compétente a définitivement arrêté sa position, de regarder les conclusions dirigées formellement contre la décision initiale comme tendant à l'annulation de la décision, née de l'exercice du recours administratif préalable, qui s'y est substituée ».
 
En l’espèce, la requérante avait bien exercé un RAPO, qui avait été reçu le jour de l’enregistrement du recours contentieux. Le tribunal administratif avait rejeté la demande car elle avait été déposée avant que l’autorité administrative n’ait arrêté sa décision.

À la date à laquelle le tribunal avait statué, l’administration s’était déjà prononcée sur la demande. La Haute cour considère que dans ces conditions « le caractère prématuré de la demande contentieuse avait été couvert par le rejet du recours administratif ». Ainsi, en rejetant la demande, le tribunal administratif a commis une erreur de droit.
 
Pour aller plus loin :
Sur les recours administratifs préalables, voir Le Lamy contentieux administratif, étude 4 : les recours et demandes préalables.
Source : Actualités du droit