Les locaux de la PAF de Menton ne constituent pas un "centre de rétention illégal"

Public - Droit public général
23/06/2017
En l'absence d'atteintes graves et manifestement illégales à la liberté de circulation et au droit d'asile établies de façon suffisamment certaine et précise, il n'y a pas lieu de suspendre la décision informelle du préfet de créer une zone de rétention provisoire pour personnes non admises au sein des locaux de la police aux frontières (PAF) à Menton. 
Telle est la décision prise par le juge des référés du Tribunal administratif de Nice le 8 juin 2017.

En l'espèce, des locaux aménagés dépendant de la PAF à Menton sont dédiés au regroupement d'étrangers ayant franchi illégalement la frontière italienne, dans l'attente de l'examen de leur situation au regard des dispositions légales européennes et françaises régissant leurs conditions d'accueil. Les associations requérantes demandent au juge qu'il soit mis fin à cette situation qui porte atteinte, selon elles, à la liberté fondamentale de circulation et au droit d'asile des personnes retenues contre leur gré et à leur accès au droit. Les associations font grief au préfet de les priver de tout moyen de recours et d'accès à des avocats ou à des associations dont l'objet est de les défendre. Elles font valoir que, durant une durée indéterminée, elles ne peuvent sortir de ces locaux, en violation des dispositions de l'article 78-3 du Code de procédure pénale.

Le tribunal cite l'arrêt "Saadi" rendu par la CEDH (CEDH, 29 janv. 2008, aff. 13229/03) qui admet que la faculté des États de placer en détention des candidats à l'immigration est un corollaire indispensable au droit de contrôler l'entrée et le séjour des étrangers. Cependant, cette détention pour ne pas être arbitraire, doit se faire "de bonne foi", "doit être étroitement liée au but consistant à empêcher une personne de pénétrer irrégulièrement sur le territoire", doit se dérouler "dans des conditions appropriées" et sa durée ne doit pas excéder "le délai raisonnable pour atteindre le but poursuivi". En l'espèce, il ressort des attestations qu'une partie des personnes interpellées "y resteraient quelques heures avant d'être renvoyées en Italie" ou bien "pensent qu'elles avaient passé la nuit dans les locaux de la gare de Menton".

Le tribunal estime qu'aucun élément suffisamment précis ne permet d'affirmer que la durée de maintien excèderait le délai raisonnable précité ou bien encore celui prévu par l'article 78-3.

Le tribunal rend la décision susvisée mais précise que, dans l'hypothèse où le maintien des étrangers en situation irrégulière dans ces locaux excéderait une durée de quatre heures, il y a lieu d'enjoindre au préfet de procéder au transfert des personnes retenues vers une des zones d'attente des articles L. 221-1 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par Marie Le Guerroué
Source : Actualités du droit