Focus sur la responsabilité du notaire

Civil - Responsabilité
03/04/2019
Deux arrêts du 27 mars méritent de se pencher sur les faits d’espèce. Les solutions sont, en effet, assez rares pour être relevées, la responsabilité du notaire n’ayant pas été retenue !
Vente immobilière. – Une promesse synallagmatique de vente a été conclue et l’acquéreur a donné au notaire un chèque du montant du dépôt de garantie qui a été stipulé acquis en cas de non-réitération de la vente avant le 15 avril 2010. Sachant le chèque sans provision, le notaire n’a pas procédé à son encaissement. Or, la vente a été repoussée au 15 septembre 2010 et le prix a été revu à la baisse. Le vendeur reproche au notaire de ne pas l’en avoir informé et tenu dans l’espérance de la réitération de la vente dans les conditions stipulées au compromis. La vente a cependant été réitérée à un prix moindre et au-delà du terme stipulé dans la promesse.
Les juges du fond ont rejeté la demande d’indemnisation du vendeur, motifs pris de l’absence de lien de causalité entre le défaut d’information du notaire sur la non provision du chèque et du préjudice tiré de la perte de chance de ne pas contracter. Le vendeur arguait, en effet, qu’il avait été contraint de réitérer la vente à des conditions qui lui étaient moins favorables car il n’aurait pas pu s’y refuser à défaut de pouvoir encaisser l’indemnité d’immobilisation. Aussi, il réclamait une indemnisation à hauteur du montant de l’indemnité d’immobilisation.

La Haute juridiction confirme la décision rendue en appel. Si elle relève également que le notaire a commis une faute en n’informant pas le vendeur du défaut provision du chèque et en retardant son encaissement, elle précise que la preuve n’est pas rapportée qu’elle est à l’origine de la réalisation du préjudice. Premièrement, le retard dans la réitération de la vente n’était pas imputable au notaire. Deuxièmement, le vendeur ne justifie pas avoir reçu d’offres qu’il aurait refusées dans l’attente de la vente définitive. Troisièmement, la preuve n’est pas rapportée que la réduction du prix de vente ne résultait pas de l’évolution du marché ou bien des qualités intrinsèques du bien.
Cass. 1re civ., 27 mars 2019, n° 18-15.596, D

Donation avec volonté de rétention d’usufruit non retranscrite. – Une donation-partage a été consentie par un père au bénéfice de ses enfants mineurs. Le bien donné a été désigné comme étant la nue-propriété de la quote part qu’il détenait en indivision d’un bien immobilier. Toutefois, l’acte poursuit en mentionnant le bien donné en pleine propriété, sur l’entrée en jouissance, l’estimation des biens et la publication foncière. Les juges du fond ont alors estimé que la donation-partage portait sur la pleine propriété des droits indivis.

Le donateur a dès lors sollicité la mise en œuvre de la responsabilité du notaire pour ne pas avoir respecté la volonté exprimée de ne transmettre que la nue-propriété de ses biens. Les juges du fond n’ont pas fait droit à cette demande considérant qu’il ne rapportait pas la preuve que sa volonté était différente de l’interprétation donnée par les premiers juges sur l’objet de l’acte. La Haute juridiction abonde dans le sens de la cour d’appel considérant que c’est dans l’exercice de son pouvoir souverain qu’elle a jugé que l’existence d’un préjudice et d’un lien de causalité avec la faute alléguée n’était pas prouvée.
Cass. 1re civ., 27 mars 2019, n° 18-15.016, D

Pour aller plus loin, v. Le Lamy Droit de la responsabilité, étude 438.
Source : Actualités du droit