Livre VI – L’application et l’exécution des mesures éducatives et des peines

Pénal - Procédure pénale, Informations professionnelles, Droit pénal général
04/11/2019
Toujours selon le principe de spécificité et de spécialisation de la justice des mineurs, le Code de justice pénale des mineurs organise l’application et l’exécution des mesures éducatives et des peines.
Titre I – De l’application des mesures éducatives et des peines
Le titre I est consacré à l’application des mesures éducatives et des peines prononcées à l’encontre des mineurs.
 
Chapitre I – Des juridictions de l’application des mesures éducatives et des peines
Section I – De la compétence des juridictions pour mineurs en matière d’application des mesures éducatives et des peines
Concrètement :
  • lorsqu'une mesure éducative judiciaire est prononcée, le juge des enfants est compétent pour contrôler son déroulement ; il peut modifier les modalités et le contenu ou ordonner la main levée après avoir auditionné le mineur, assisté de son avocat, et ses représentants légaux ; s’ils ne comparaissent pas, le juge pourra se prononcer sur les modalités ou le contenu de la mesure (art. L. 611-2) ;
  • lorsqu’une condamnation a été prononcée, le juge des enfants exerce les fonctions dévolues au juge de l’application des peines, à l’égard des mineurs condamnés jusqu’à leur vingt-et-un ans (L. 611-2) ; le tribunal des enfants exerce les attributions dévolues au tribunal de l’application des peines (L. 611-3) ;
  • en cas d’appel d’une décision rendue par le juge des enfants ou le tribunal pour enfants, la chambre spéciale des mineurs de la cour d’appel ou son président, exerce les compétences respectivement confiées à la chambre de l'application des peines de la cour d'appel et à son président (L. 611-4).
Il n’empêche que « Le juge des enfants peut se dessaisir au profit du juge de l'application des peines lorsque le condamné a atteint l'âge de dix-huit ans, en raison de la personnalité du mineur ou de la durée de la peine prononcée » (L. 611-5). Et, « Lorsque le condamné a atteint l'âge de dix-huit ans au jour de son jugement, le juge de l'application des peines est compétent pour le suivi de la condamnation, sauf si la juridiction spécialisée décide par décision spéciale que le juge des enfants reste compétent » (L. 611-6)Ces décisions ne sont pas susceptibles de recours.
 
Section II – De l’articulation des compétences entre plusieurs juges des enfants chargés du suivi du mineur
Le premier article pose le principe selon lequel le juge des enfants qui connaît habituellement la situation du mineur, est celui du lieu de la résidence habituelle du mineur ou de ses parents, saisi d’une procédure en assistance éducative ou d’une procédure pénale concernant le mineur (L. 611-7).
 
Lorsque le juge des enfants chargé de l’application des peines territorialement compétent, mais non celui qui connaît habituellement la situation du mineur, il devra transmettre à ce dernier une demande d’avis avant toute décision prise en application des dispositions de l'article 712-6 du code de procédure pénale. Et pourra aussi le consulter pour tout autre décision. De même pour les décisions du tribunal pour enfants en application des dispositions de l'article 712-7 (L. 611-8).
 
Il est aussi prévu que « Le juge des enfants chargé de l'application des peines initialement saisi peut se dessaisir au profit du juge des enfants qui connaît habituellement la situation du mineur, après avoir obtenu l'accord préalable de ce magistrat. La saisine de ce juge emporte également saisine du tribunal pour enfants correspondant ». Cette mesure n’est pas susceptible de recours.
 
Chapitre II – Des audiences d’application des peines
Concernant les audiences du juge de l’application des peines, le mineur « doit être assisté d’un avocat au cours des débats contradictoires » mais aussi « lorsque, en acceptant un aménagement de l'exécution de sa peine, le mineur est susceptible de renoncer à la tenue de ce débat ». Le mineur « ne peut renoncer à l’assistance d’un avocat ». Dans le cas où un choix n’a pas été fait par le mineur ou ses représentants légaux, le juge des enfants ou le tribunal des enfants, fera désigner par le bâtonnier un avocat commis d’office (L. 612-1).
 
Les représentants légaux doivent eux être convoqués pour être entendus et ils se verront notifier les ordonnances et jugements (L. 612-2 et L. 612-3). Étant précisé que « Les dispositions du présent chapitre ne sont pas applicables au condamné devenu majeur au jour du débat contradictoire », selon l’article L. 612-4 du Code.
 
Chapitre III – Du régime de la rétention
L’article L. 613-1 précise que « Le mineur retenu en application des dispositions des articles 709-1-1 et 716-5 du code de procédure pénale bénéficie des droits prévus à l'article L. 332-1 du présent Code ».
 
Titre II – De l’aménagement des peines
Chapitre unique
Les mineurs âgés de seize à dix-huit ans au moment de la décision, qui étaient âgés d’au moins treize ans à la date de la commission de l’infraction, peuvent convertir une peine en TIG ou en sursis probatoire comportant l’obligation d’effectuer un TIG (art. L. 621-1).
 
L’article L. 621-2 du Code prévoit que « Pour l'exécution des peines prononcées à l'étranger et lorsque le condamné était mineur à la date des faits, le tribunal pour enfants exerce les attributions du tribunal correctionnel pour l'application des articles 728-4 à 728-7 du code de procédure pénale et le juge des enfants exerce les attributions du président du tribunal de grande instance et du juge des libertés et de la détention pour l'application des articles 728-46, 728-47 et 728-67 à 728-69 du même code.
Le juge des enfants exerce les attributions du juge de l'application des peines mentionnées aux articles 764-21 à 764-43 du code de procédure pénale en matière de reconnaissance et de mise à exécution des condamnations et des décisions de probation prononcées par une juridiction d'un autre Etat membre de l'Union européenne à l'égard des personnes mineures à la date des faits ».
 
Titre III – Du casier judiciaire et des autres fichiers
Le Code de justice pénale des mineurs ne connaît pas ici d’importantes évolutions, au grand regret des professionnels de la justice des enfants et des mineurs. Pierre Lecorcher, de la CGT PJJ a, dans ce sens, précisé qu’ils avaient demandé « un droit à l’oubli pour ces enfants, c’est-à-dire l’effacement du casier judiciaire n° 1 et qu’il y ait un autre regard sur les inscriptions à tous les fichiers de police et de justice ».
 
Avis partagé par le Syndicat de la Magistrature : « un droit à l'oubli est nécessaire pour les mineurs, la sanction pénale ne devant pas être une entrave à leur évolution future. À ce titre, quitte à réformer l'ordonnance de 1945, il aurait été souhaitable de se pencher sur les conditions d'inscription des condamnations des mineurs dans différents fichiers, au premier chef desquels le casier judiciaire » (Observation du Syndicat de la magistrature sur l’avant-projet de réforme de la justice pénale des mineurs).
 
Chapitre I – Du casier judiciaire
Sont inscrits au bulletin n°1 du casier judiciaire :
  • les condamnations ;
  • les déclarations de culpabilité assorties d’une dispense de peine ;
  • une dispense de mesure éducative ou une déclaration de réussite éducative ;
  • les décisions prononçant des mesures éducatives rendues lors du prononcé de la sanction ;
  • les compositions pénales.
Quant aux délais, l’article L. 631-3 prévoit que « Les fiches relatives aux mesures éducatives, aux dispenses de mesure éducative et aux déclarations de réussite éducative prononcées à l'encontre d'un mineur sont retirées à l'expiration d'un délai de trois ans à compter du jour où la mesure a été prononcée si la personne n'a pas, pendant ce délai, soit subi de condamnation à une peine criminelle ou correctionnelle, soit exécuté une composition pénale, soit fait l'objet d'une nouvelle mesure éducative prononcée en application du présent code ». Et les fiches relatives aux condamnations prononcées sont retirées selon les dispositions prévues par le Code de procédure pénale.
 
Lorsque la rééducation du mineur apparaît acquise, le tribunal pour enfants pourra décider, à la demande du mineur, celle du ministère public ou d’office, du retrait du casier judiciaire après un délai de trois ans. Le tribunal statuera en dernier ressort au titre de l’article L. 631-4.
 
Chapitre II – Du fichier judiciaire national automatisé des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes
Section I – De l’inscription des décisions
Le Code de justice pénale des mineurs prévoit que les décisions concernant les mineurs ayant moins de treize ans ne peuvent être inscrites dans le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes (L. 631-1).
 
Pour les mineurs âgés d’au moins treize ans :
  • les décisions relatives à un délit relevant de l’article 706-47 du Code de procédure pénale relatif aux infractions de nature sexuel ne sont pas inscrites dans le fichier, à moins qu’une inscription ait été ordonnée par décision expresse de la juridiction, ou dans certains cas par le procureur de la République (L. 632-1) ;
  • les décisions relatives à un crime relevant de l’article 706-47 du Code de procédure pénale sont inscrites de plein droit dans le fichier (L. 632-2).
 
Section II – De l’effacement des décisions
L’article L. 632-4 informe que les informations mentionnées à l’article 706-53-5 du Code de procédure pénale (l’adresse et les changements d’adresse) seront retirées du fichier au décès du mineur ou à l’expiration d’un délai de dix ans à compter du prononcé de la décision ou de sa libération lorsque l’intéressé exécute une peine privative de liberté sans sursis.
 
Pour rectifier ou effacer les informations contenues dans le fichier, l’article renvoie à l’article 706-53-10 du Code de procédure pénale.
 
Section III – Du suivi des mineurs inscrits
L’article 706-53-5 du Code de procédure pénale dispose que « Si la personne a été condamnée pour un crime ou pour un délit puni de dix ans d'emprisonnement, elle doit justifier de son adresse une fois tous les six mois ». Et, « Si la dangerosité de la personne le justifie, la juridiction de jugement ou, selon les modalités prévues par l'article 712-6, le juge de l'application des peines peut ordonner que cette présentation interviendra tous les mois. Lorsque la personne est en état de récidive légale, le régime de présentation mensuelle s'applique de plein droit ».
 
L’article L. 632-5 du Code de justice pénale des mineurs précise que ce régime de justification semestrielle n’est applicable qu’aux mineurs âgés de treize à dix-huit ans, condamnés pour un crime puni d’au moins vingt ans de réclusion.
 
Chapitre III – Du fichier national automatisé des auteurs d’infractions terroristes
Section I – De l’inscription des décisions
« Les décisions rendues lors du prononcé de la sanction concernant les mineurs âgés d’au moins treize ans ne sont pas inscrites dans le fichier, sauf si cette inscription est ordonnée par décision expresse de la juridiction ou, dans les cas prévus aux mêmes 3° et 4° de l’article 706-25-4 du Code de procédure pénale, par le procureur de la République » (L. 633-2).
 
Section II – De l’effacement des décisions
Ces informations sont retirées « au décès de l'intéressé ou à l'expiration, à compter du prononcé de la décision ou à compter de sa libération lorsque la personne exécute une peine privative de liberté sans sursis en application de la condamnation entraînant l’inscription, d'un délai de dix ans ou, lorsqu'elles concernent une infraction mentionnée aux articles L. 224-1 ou L. 225-7 du Code de la sécurité intérieure, dans un délai de trois ans » (L. 633-3). Pour rectifier ou effacer certaines informations, le mineur doit se conformer aux conditions prévues à l’article 706-25-12 du Code de procédure pénale.
 
Section III – Du suivi des mineurs inscrits
« Les mineurs sont astreints aux obligations de justification et de présentation prévues par le code de procédure pénale à compter du prononcé de la décision, pendant un délai de cinq ans, ou, s'il s'agit d'une infraction mentionnée à l'article L. 224-1 du Code de la sécurité intérieure, pendant un délai de trois ans » mentionne l’article L. 633-4.
 
Chapitre IV – Des fichiers d’antécédents
L’article L. 634-1 fait son apparition dans le Code par rapport à la première version du Code publiée, il dispose que les infractions commises par les mineurs font l’objet d’une inscription dans les fichiers d’antécédents judiciaires pouvant être consultés dans le cadre des procédures pénales ou des enquêtes administratives.
 
« Les mineurs peuvent demander, auprès du procureur de la République territorialement compétent ou du magistrat désigné à l'article 230-9 du Code de procédure pénale, que les données personnelles concernant ces infractions soient effacées, complétées ou rectifiées, notamment en cas de requalification judiciaire, ou qu'elles fassent l'objet d'une mention interdisant qu'elles fassent l'objet d'une consultation dans le cadre des enquêtes administratives mentionnées au premier alinéa ». Et, « ces demandes peuvent être formées à tout moment, sauf si, à la suite d'infractions commises pendant la majorité de l'intéressé, celui-ci a fait l'objet de condamnations qui sont toujours inscrites au bulletin n° 2 de son casier judiciaire. Il est statué sur ces demandes pour des raisons liées à la finalité du fichier au regard de la nature ou des circonstances de commission de l'infraction ou de la personnalité de l'intéressé ».
 
Source : Actualités du droit